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Depuis
des jours, depuis des temps, enfant que j'aime, j'accompagne
tes pas et console ta peine mais tu ne m'entends pas, enfermée
que tu es dans la souffrance causée par cette crasse
abjecte qui te souille et te souille à chacun de
tes pas
Aujourd'hui, parce que la coupe est pleine, tu oses enfin
clamer ta peine et tes paroles viennent jusqu'à moi
qui tends la main
Où est ta joie, enfant que j'aime ?
Ô toi que j'ai serrée dans mes bras,
ô
pourquoi ne comprends-tu pas ?
et tu tires sur cette
chaîne qui te retient en bas car tu voudrais rejoindre,
là-bas, ces Esprits qui tendent les bras pour projeter
amour et joie sur ton dessein tant obscurci.
Cur serré, étreint d'une souffrance
qui ne laisse plus de chance à la valeur et à
l'espoir, tu es venue, enfant chérie, au terme dur
de ce long soir où déjà s'enfuyait
ta vie, te blottir à mes pieds comme le chien effaré
qui, tremblant et perdu, vient de quitter la rue et les
affres de ces espaces pour venir retrouver sa place aux
pieds de ce Maître aimé ; et tes yeux se sont
levés, bête pitoyable que j'aime
Oui,
tu as fait de même : tu as, comme le chien fidèle,
recherché l'abri de l'aile de la clarté, de
la pureté, pour te sentir enfin portée, pour
te sentir enfin bercée
pour oublier l'Humanité.
Relève-toi, enfant que j'aime. Ta main d'un geste
large, sème au visage de l'Humanité la grandeur
et la beauté d'un Dieu vivant de Lumière.
Les Ombres ont quitté leur tanière et s'avancent
en rangs serrés pour définitivement t'encercler
pour enfin pouvoir te blesser, pour enfin te terrasser,
Ombres sinistres des cavernes.
Les abîmes ont ouvert
leurs portes et ta voix puissante ne porte pas plus loin
que tes pas car l'Humanité en folie danse, danse,
crie et rit, incubes, succubes échevelés qui
se sont nourris du lait de la discorde et de la haine, du
vice et de l'abjection qu'ils ont puisés dans leur
passion, dans leur passion et dans leur haine
J'ai pris ton visage dans mes mains et je t'offre des lendemains
pleins de lumière et pleins de gloire
Je sais, tu as toujours l'espoir d'un chemin moins cahoteux
pour ceux qu'accompagnent tes vux mais, enfant chérie,
lorsqu'on se baigne dans la lie, dans la fange et dans la
crasse, où peut-il être une autre place pour
ces
"démons" qui m'ont banni ?
Ton
chemin n'est pas de ce monde, viens avec moi dans la ronde
des Esprits qui t'accompagnent !
Viens !
fuis
la crasse, la haine, la hargne ; viens avec moi sur ce chemin
qui va te conduire à des demains pleins de lueurs
d'espérance car tu as eu cette chance de la découverte
de la vie. Viens avec moi, enfant chérie ; ta tête
est sur mon épaule et mes doigts enfin te frôlent
pour te redonner l'envie d'accompagner enfin mes pas sans
souhaiter ce dur trépas qui t'arrachera à
la vie
Près de moi, un poète* pleure et lance, dans
l'élan de son cur, ces phrases qu'il voudrait
t'offrir.
Il trouve la force de sourire et chante dans son émoi
ces mots qui faisaient ta joie :
- « Je t'offrirai des perles de pluie venues d'un
pays où il ne pleut pas
»
Perles de pluie sur ta vie !
Dans ce pays, enfant,
où il ne pleut jamais, où seule la pluie bienfaisante
de l'ondée divine, éternelle et pure se répandra,
viens, accompagne mes pas
Je t'offrirai le cristal chantant des sources qui coulent,
pures et claires, sur des galets très blancs
Je t'offrirai l'enchantement sans mesure de la beauté
Je t'offrirai le bouquet chatoyant des promesses vivantes
Je t'ai déjà offert le rubis de mon cur,
et mon Père tend vers toi la coupe du bonheur qui
contient en son écrin la pierre de ton destin, le
diamant pur et beau, irisé de mille feux
Ouvre enfin les yeux au séjour bienheureux qui est
le tien, enfant que j'aime
Tu as été l'ombre de mon ombre, l'ombre de
ma vie, l'ombre de ma main
Tu as creusé la terre jusqu'après ma mort
pour recouvrir mon corps d'or et de lumière
Je ne te quitte pas
Tout peut s'oublier
Remonter
le temps
retrouver le temps des bonheurs perdus, oublier
ce temps des malentendus, des souffrances qui détruisent
Ah ! qu'enfin l'Humanité puise à la source
vive de Dieu !
Je sais ce royaume où l'amour est roi
où
j'ai été Roi
où tu seras Reine
Allons ! Allons ! Apaise ta peine car Dieu réunit
ceux qu'il aime
Mère de miséricorde, tends ta main pour écarter
la horde de l'abjection et de l'horreur et puisqu'elle a
partagé tes heures de désarroi et de chagrin,
veux-tu enfin tendre la main pour faire briller sur son
chemin l'étoile de Sa Miséricorde !
Ô Père, Père, tu ne l'as pas abandonnée
!
Merci de l'avoir amenée portant sur son épaule
la croix, la croix dont les échardes de bois blessent
sa chair écartelée.
Je m'incline devant toi, mon Dieu, et en cette période
de vux, je formule ce vu sincère de voir
s'enfuir cette misère qui écrase sa vie en
alourdissant ses pas.
Père
fais qu'elle entende ma voix et que, unis
dans cet Au-delà que la porte du trépas ne
peut encore lui donner, fais que des Esprits de Lumière
lui offrent la plus belle bannière afin qu'elle serre
ses doigts sur ce morceau d'un autre bois qui doit, brandi
avec amour, avec force et pour toujours, faire se refermer
les tanières.
Longtemps, longtemps, longtemps après que la lumière
aura disparue, des êtres, en pleurant, la chercheront
encore dans les rues
Allons, Marie-Madeleine, relève la tête, regarde
!
Dans leurs habits de fête, ils sont tous descendus
pour t'accueillir et te bénir, être élu
de mon cur, être aimé de leurs curs
Il n'y a qu'un chemin du bonheur, nous le continuerons ensemble
Je sens ta main qui tremble dans la mienne, enfant chérie
; permets que Moi, je l'embrasse et qu'elle reste à
cette place entre mes doigts serrés, entre mes doigts
bénis, car je suis le Chemin de sa Gloire, et
je suis le Chemin de ta vie
Jésus
message reçu par incorporation
médium : marcelle olivério
*
Jacques BREL
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