Des Esprits…

 

De l'action effective des démons dans le monde visible…

 

 

   

L'abbé - N'oubliez pas ce que nous avons établi jusqu'ici, et permettez-moi de vous le rappeler. Il est entré dans le plan de Dieu, lorsque sa sagesse ordonnait toutes les choses que sa puissance allait tirer du néant, de relier le monde inférieur au monde supérieur, les Hommes aux anges, par des relations positives ; et ces relations, dans la volonté divine, devaient avoir pour fondement et pour règle la vérité et la charité. Mais un fait grave s'est produit dans les cieux ; une grande défection s'est opérée, et la société des anges s'est scindée en deux parts pour former deux sociétés contraires, la cité du ciel et la cité de l'enfer.
Ce fait gigantesque de la désertion des mauvais anges a dû ébranler la création entière, et le contrecoup d'une chute aussi forte s'est fait nécessairement ressentir dans toutes les sphères où peut s'exercer l'action des Esprits, comme dans toutes les créatures avec lesquelles ils devaient entrer en rapport. […] Et ils n'interviendront auprès des Hommes que pour souffler dans leurs cœurs les passions qui les brûlent. S'ils fussent demeurés dans la vérité et dans l'amour, ils devaient former une seule Eglise : ils auraient employé leur activité à faire de nous leurs compagnons dans la vérité et dans l'amour. Mais, déchus de cette gloire, ils ne travailleront qu'à nous faire tomber dans leur haine, respirer leur fureur, vivre de leurs mensonges et partager leur infortune. Ils conserveront des rapports avec ce monde ; mais ces rapports ne seront plus régis, de leur côté, que par l'amour du mal qui fait le fond de leur volonté perverse. Toutefois, Dieu, qui sait tirer le bien du mal même, leur permettra d'user en partie de leur moyen de séduction dans un but d'épreuve, pour fournir à tous les Hommes une occasion de mérite et de gloire par un triomphe d'autant plus honorable que la lutte sera plus acharnée.

Léon - Les démons, selon vous, entreront donc en rapports avec notre monde, ils conserveront la faculté de nouer des relations avec nous ; et ils les tourneront contre Dieu et contre son Christ. Dieu le leur permettra pour laisser se produire, sur le théâtre de ce monde, la lutte du bien et du mal.




L'abbé - Adam et Eve étaient à peine sortis des mains de Dieu, tout inondés encore de ses dons, que déjà, le prince du mal s'avance vers eux, dans ce paradis de délices où la bonté divine les avait placés. Par ses questions captieuses, ses négations hardies, ses promesses astucieuses, il ne réussit que trop à entraîner nos premiers parents dans sa défection.
Il est facile, ce me semble, de découvrir, dans ce drame de l'Eden, le rôle que le démon s'apprête à jouer dans le monde, et le travail de démolition auquel il veut consacrer son activité. C'est à faire des ruines qu'il emploiera toutes les ressources de sa vaste intelligence, toute la rage de sa haine, et toutes les forces de sa puissance. Et quelles ruines ! ruines de la vérité, ruines de la morale pure et sainte, ruine du bien ; c'est-à-dire dégradation de l'intelligence, corruption du cœur, dépravation de la volonté, anéantissement de la vertu, de la justice et de la sainteté. Bannir Dieu et son Christ du sein de l'humanité, et régner à sa place, c'est à quoi il prétend.

Léon - Il a dit une fois pour toujours : je serai semblable au Très-Haut. Ne pouvant lui ravir son trône, il veut au moins s'en venger en lui ravissant le cœur de l'Homme. Ne pouvant bannir Dieu, du Ciel, il travaille à le bannir de la Terre.

L'abbé - Le genre humain est tombé sous l'empire de son ennemi par droit de conquête.
En effet, Satan pouvait bien proposer le mal à Adam et employer mille ruses pour le séduire ; mais il ne pouvait pas contraindre sa volonté. C'est dans la plénitude de leur liberté que nos premiers parents ont renié Dieu. Et voyez ce qu'ils ont fait. Par leur désobéissance, ils ont dit à Dieu : Vous n'êtes pas la vérité : cet Esprit qui nous parle, nous dit le contraire de vous ; nous croyons en lui, et nous acceptons sa parole. Vous n'êtes pas l'amour, car vous nous défendez ce qui ferai notre bonheur et notre gloire, en nous donnant la science. Vous êtes un tyran plutôt qu'un Dieu bon.
Le pouvoir de Satan, sur notre race, dépendait de la liberté humaine : il serait resté enchaîné si l'Homme n'était passé volontairement sous sa domination. […] Vaincu par le démon, Adam est donc devenu son sujet… […] Mais l'Homme cependant restera toujours libre de choisir entre la loi du Christ et celle de son ennemi.




Léon - Vous considérez donc l'accueil fait au démon par Adam, dans l'Eden, comme un acte qui a introduit l'ennemi dans la place, et l'en a rendu maître.

L'abbé - Je dois appuyer ces affirmations sur d'incontestables autorités. En pareille matière, le mieux est toujours d'interroger les Hommes savants et saints. Leur regard, purifié par la sainteté, possède une vigueur qui nous manque. Notre intelligence d'ailleurs est, par elle-même, si infirme ; tant de misères viennent encore si souvent ajouter à ses ténèbres et augmenter ses défaillances, que, ne pouvant plonger ni assez profond ni assez loin, c'est sagesse d'écouter l'enseignement des Hommes éminents, en vertus comme en science, parce que la science, quand elle n'est pas sous la conduite de la vertu, se met volontiers au service des passions pour combattre la vérité
« Quand aux rapports des anges déchus avec le monde sensible, dit Klée, on trouve dans Tertullien et dans plusieurs autres Pères, l'idée que les démons, en entraînant le monde dans le mal, ont bouleversé l'univers et soumis le monde à leur puissance. Origène leur attribue aussi les persécutions. »
Saint Léon-le-Grand n'est pas moins explicite. « L'orgueil de l'ancien ennemi, dit-il, ne revendiquait pas sans raison un empire tyrannique, et il n'exerçait pas une domination indue sur les Hommes, puisqu'il les avait détournés, de leur plein consentement, de l'observation du précepte divin.

Or, mes amis, les démons ayant conquis un empire sur l'Homme par le fait de la désobéissance de celui-ci aux ordres de Dieu, leur pouvoir s'est étendu sur tout ce qui compose le domaine du genre humain, c'est-à-dire sur le monde entier et sur toutes les créatures qu'il renferme

Enflé de ce bon succès, et n'oubliant pas son premier dessein de s'égaler à la nature divine, il se déclara ouvertement le rival de Dieu… » […] Il a toujours affecté de faire ce que Dieu faisait, non pas pour se rapprocher en quelque sorte de la sainteté (c'est sa capitale ennemie), mais comme un sujet rebelle, qui par mépris ou par insolence affecte la même pompe que son souverain. Dieu a ses vierges qui lui sont consacrées, et le diable n'a-t-il pas eu ses vestales ? n'a-t-il pas ses autels et ses temples, ses mystères et ses sacrifices, et les ministres de ses impures cérémonies, qu'il a rendues -autant qu'il a pu- semblables à celles de Dieu ?




tableau d'Annie Lauro


L'Esprit de Dieu, au commencement était porté sur les eaux ; et le diable, dit Tertullien, se plaît à reposer dans les eaux, dans les fontaines cachées, et dans les lacs, et dans les ruisseaux souterrains…
Dieu, par son immensité, remplit le Ciel et la Terre…
Il est l'émule de Dieu et il singe la vérité de ses œuvres. En effet, pour mieux nous tromper, il prend un masque, il copie Dieu, cherchant à imiter ses voies ; il donne au mensonge la couleur de la vérité… Il oppose à la parole et aux œuvres divines, sa parole et ses œuvres en les couvrant d'un manteau brillant… Quand il dresse ses pièges, il se cache, il se dissimule, il s'enveloppe du mystère… C'est un envieux qui ourdit ses trames dans l'ombre… avec une astuce habile, qu'on a peine à saisir la main d'où partent les coups qui nous blessent. [Tertullien]

Léon - Je suis on ne peut plus frappé de cette parole de Tertullien reproduite par Bossuet : Le démon occupe autant qu'il peut toutes les créatures. Il exerce donc en effet une action malfaisante sur la nature entière, et glisse un venin secret dans toutes les substances matérielles !

L'abbé - C'est bien là son œuvre !… L'Eglise nous l'enseigne clairement dans les formules d'exorcismes qu'elle emploie pour purifier les choses qu'elle veut bénir : l'huile…
[…]
La bénédiction du sel et de l'eau nous présente les mêmes idées.
[…]
Ces exorcismes expriment bien clairement la croyance de l'Eglise à l'action corruptrice des démons, qui occupent toutes les créatures, s'y enracinent par un principe malfaisant, un poison secret dont ils les remplissent autant qu'ils le peuvent.

Arthur - J'avais toujours regardé l'eau bénite comme une puérilité indigne d'un Homme qui a conscience de sa dignité, et les bénédictions comme des superstitions.

L'abbé - C'est ainsi que juge le monde. Vous êtes, Arthur, partisan du magnétisme ; vous avez cru jusqu'à ce moment que vous pouvez, par ce que vous appelez : fluide magnétique, communiquer à un verre d’eau une vertu de guérison qui rendra la santé à un malade, ou tout au moins lui apportera quelque soulagement ; et il ne vous est pas venu à la pensée qu'à plus forte raison Dieu pourra-t-il communiquer à cette eau une efficacité bienfaisante. Encore une fois, quelle étrange contradiction !
Dites-moi donc, Arthur : si les Esprits méchants peuvent communiquer par les moyens dont ils disposent, une vertu maligne aux diverses créatures, pourquoi Dieu ne pourrait-il pas communiquer à ces mêmes créatures une vertu bienfaisante ?
[…]
Car, ainsi que nous l'avons vu, il n'est pas un atome dans la matière qui, de près ou de loin, n'agisse en bien ou en mal sur notre organisme, et par notre organisme, sur l'âme elle-même…
[…]
Le but de la venue du Sauveur sur la Terre est de détruire les œuvres du démon et d'arracher à son empire et l'Homme et les choses qui sont au service de l'Homme. Et la mission de l'Eglise ici-bas est -aurait dû être- de continuer l'action réparatrice du divin Libérateur…




Il y aurait encore, Arthur, de hautes considérations à faire sur l'eau bénite. N'est-ce pas l'eau qui est le principe générateur des corps ? N'est-ce pas l'eau que Jésus-Christ a employée pour symboliser la régénération de l'Homme par le baptême, et produire dans son âme la vie divine qui lui donne l'être surnaturel ? N'est-ce pas dans l'élément de l'eau que les sacrements sont renfermés ?
Au commencement des choses, l'Esprit de Dieu ne se mouvait-il pas sur les eaux pour les pénétrer d'une vertu féconde ?…

Arthur - J'étais loin de considérer les choses à un tel point de vue. Il faut l'avouer, l'eau bénite n'est pas, comme je l'avais cru, une puérilité ridicule.

L'abbé - Sachez-le bien, Arthur, si vous ne regardez que le côté matériel, et l'acte purement extérieur des cérémonies du culte, vous ne verrez que des choses méprisables.

Arthur - Tout à l'heure vous allez me persuader qu'il faut faire usage de l'eau bénite ?

L'abbé - Pourquoi non, si elle est imprégnée d'une efficacité divine ? Ne voyez-vous pas de quelle utilité elle peut être pour vous ? Revenez encore à la sainte coutume de nos Pères, qui ne s'asseyaient jamais à une table sans bénir, par la prière, par le signe de la croix, les aliments qu'ils allaient prendre.
Selon Porphyre « il n'est aucun mal que les mauvais génies n'entreprennent de faire… Ils agissent dans le dessein de nous détourner de la connaissance des Dieu et de nous attirer à eux. C'est pour cela qu'ils enflamment les passions des Hommes par l'amour et le désir des richesses, du pouvoir, des plaisirs et de la fausse gloire : d'où naissent les dissensions et les guerres, avec tous les maux qu'elles produisent… Le mensonge leur est familier… » [passage cité dans Eusèbe, Prép, év. I. IV, n° 22]




Léon - Après tous ces témoignages, il est impossible de ne pas admettre que les anges déchus exercent une action réelle sur ce monde ; mais aucun frein n'est-il opposé à leur fureur ? dans quelle limite leur est-il permis d'user de leur pouvoir ?

L'abbé - Assurément, mes amis, Dieu reste toujours le maître souverain de ses créatures. Dès lors le pouvoir des démons demeure, dans son exercice, soumis à la disposition du suprême Régulateur des choses. La puissance des Esprits du mal est donc plus ou moins limitée, et Dieu leur lâche ou retient la bride, selon que le demandent les secrets desseins de sa Providence. Rappelez-vous le mot de Bossuet : « Si Dieu ne retenait leur fureur, nous les verrions agiter ce monde avec autant de facilité que nous tournons une petite boule. » Et cet autre mot de saint Augustin : « S'ils usaient de toute leur puissance, aucune créature ne pourrait subsister. » Dieu, donc, retient leur fureur et lui impose des limites qu'elle ne peut franchir. L'Apôtre nous dit aussi que Dieu ne leur permet pas de nous tenter au-dessus de nos forces.

   
 

Mais, dans tous les cas, quelle que soit la limite ou l'étendue de l'action qu'il est permis à ces Esprits pervers d'exercer sur les Hommes et sur les choses, ils ne peuvent nous séduire malgré nous.

 

 

    D'ailleurs, remarquez-le bien, leur empire dépend de nous ; et il est beaucoup de choses qu'ils ne peuvent faire qu'autant qu'ils y sont provoqués par les Hommes.

Léon - Ainsi, ce sont les Hommes qui donnent au démon le pouvoir qu'il exerce sur eux. On comprend dès lors que l'action des Esprits méchants sur ce monde se produira avec plus d'intensité à certaines époques que dans d'autres, selon que les Hommes se laisseront plus ou moins pénétrer de l'esprit d'erreur, de vices et de mensonges.

L'abbé - Ecoutez saint Augustin : « Les démons ne peuvent rien sans la permission de Dieu ; et cette permission leur est donnée par cette souveraine justice qui gouverne tout, soit pour éprouver, soit pour châtier, soit pour condamner, soit pour corriger… » [sur Job, tome III, p. 880 - édit. Migne]

Léon - C'est une consolation pour nous de savoir que jamais nous ne serons, malgré nous, les tristes jouets et les malheureuses victimes de ces êtres trompeurs.

L'abbé - Assurément, Léon, cette pensée est douce au cœur… D'ailleurs, l'action des démons, luttant ici-bas contre la vérité et la vertu, rentre dans l'ordre général et concourt au but final de la création.

Arthur - Comment cela ?

L'abbé - Saint Augustin n'hésite pas à appeler les démons "les procureurs" de la divine Providence.
   
 

« Aucune créature, aucune créature, dis-je, qui -qu'elle le veuille ou non- ne serve la divine Providence. Celle qui le veut, la sert en faisant avec elle ce qui est bien. Celle qui ne le veut pas, la sert en faisant ce qui est juste. »




 

 

   

Arthur - Que veut dire saint Augustin, en appelant les démons "les procureurs de la Providence", les magistrats de ce monde ?

L'abbé - Il n'est pas possible, Arthur, de se méprendre sur la pensée du saint évêque d'Hyppone. Assurément l'illustre docteur ne veut pas dire que les anges mauvais sont, au même titre que les bons, établis par la Providence pour gouverner ce monde et que les uns et les autres ne font qu'exécuter ses ordres. Les bons anges seuls sont établis pour administrer sous le gouvernement de Dieu. Quant aux anges déchus, il s'en sert pour exercer sa justice. Les bons sont les agents de Dieu en cherchant à faire du bien aux Hommes ; les mauvais en cherchant à nous nuire ; parce que Dieu, qui tire le bien du mal même, se sert de leur méchanceté pour produire une plus grande quantité de vertus et de bonnes œuvres.
Aussi saint Augustin dit-il dans un autre endroit « que Dieu tourne à son profit ce que font les démons pour nuire, et qu'il se sert d'eux pour l'exercice de la vertu et le plus grand avantage des bons. » C'est ainsi que les Esprits de malice sont les agents de la Providence.
Vous voyez sortir de ce combat des mérites plus nombreux, des vertus plus fortes et plus saillantes, un amour d'autant plus fidèle qu'il a subi l'épreuve, et enfin une gloire plus splendide dans une persévérance plus héroÏque ?
De cette sorte les démons concourent, malgré eux, à la gloire des bons et à celle de Dieu, dont ils font ressortir les perfections infinies dans une plus éclatante manifestation. Si bien que leur travail de démolition tourne sous la main de Dieu à une œuvre d'édification.

Arthur - Vous nous présentez les choses sous un jour bien nouveau pour moi. Décidément je veux refaire mon instruction religieuse ; car je rougis de me voir si ignorant.

L'abbé - Je vous y exhorte fort ; et, si vous persévérez dans cet honorable dessein, vous verrez s'ouvrir devant vous, à mesure que vous avancerez des horizons inconnus, et tout un monde de vérités aussi douces pour le cœur que belles aux yeux de l'esprit. Hélas ! mon ami, l'ignorance religieuse est aujourd'hui si étonnante que c'est inexprimable tristesse pour l'âme de voir tant d'intelligences, éclairées d'ailleurs sur tout le reste, plongées dans la nuit la plus sombre relativement à l'ordre surnaturel.

Léon - Votre observation n'est que trop vraie. La vérité religieuse ne sait pas flatter ; elle s'impose ; il faut que tout Esprit se courbe devant elle en la reconnaissant pour une reine d'extraction divine. Or, tant d'humilité ne va pas à l'Homme qui aspire à se faire chef d'école, et à ériger sa gloire sur une construction sortie de ses propres pensées. Il faut que tout cœur et toute volonté accepte cette loi religieuse et se soumettre à ses prescriptions ; et cet assujettissement ne va pas à des cœurs dominés par les sens.

L'abbé - Cependant, Léon, il semble que saint Augustin, saint Thomas, Bossuet, et tant d'autres qu'il serait trop long de citer, n'ont rien perdu de leur gloire pour avoir soumis leur intelligence à la foi. Il semble que saint Vincent de Paul, en prenant la loi chrétienne pour règle de sa conduite, n'a rien perdu non plus des qualités morales qui rendent un Homme digne du respect et de la vénération de ses semblables.

Arthur - Tout cela est très vrai ; mais que voulez-vous ? Il en est ainsi. La vérité et la vertu ne trouvent pas un bon accueil dans l'humanité…

L'abbé - Maintenant, mes amis, déduisons quelques conclusions. Il existe des Esprits supérieurs à l'Homme, qui peuvent exercer dans ce monde visible une action réelle en vertu de leur activité naturelle ; donc il existe des agents surhumains ; et, par conséquent, la science qui se refuserait à reconnaître dans l'univers d'autres agents que des agents physiques et humains, est une science mutilée qui n'embrasse par l'universalité des causes : « Les savants européens sont dans ce moment, dit M. de Maistre, des espèces de conjurés ou d'initiés -ou comme il vous plaira de les appeler- qui ont fait de la science une sorte de monopole, et qui ne veulent pas absolument qu'on sache plus ou autrement qu'eux. Mais cette science sera incessamment honnie par une postérité illuminée, qui accusera justement ses adeptes d'aujourd'hui de n'avoir pas su tirer -des vérités que Dieu leur avait livrées- les conséquences les plus précieuses pour l'Homme. Alors toute la science changera de face : l'Esprit, longtemps détrôné et oublié, reprendra sa place. » [Soirées de Saint-Pétersbourg]

Léon - C'est juste.

L'abbé - Ces Esprits surhumains sont, les uns bons, les autres mauvais : des démons ; donc il y a des agents diaboliques.

Léon - C'est évident.

L'abbé - Dès lors, de même qu'il est des faits physiques parce qu'il y a des agents physiques, des faits humains parce qu'il y a des agents humains, il doit y avoir des faits diaboliques, puisqu'il y a des agents diaboliques…
N'est-il pas vrai que tout effet est la manifestation d'une cause ? Un agent quelconque doit donc laisser, dans les faits qui sortent de son action, l'empreinte de sa main, le sceau de sa puissance, et des traces qui le signalent. Tout phénomène doit révéler son auteur par certains caractères qui lui sont propres ; recherchons donc les caractères des faits diaboliques.


 

Des Esprits…
   

 

   
   

Faits diaboliques… leurs caractères…

 
Des Esprits…